Neon Genesis Evangelion débarque sur Netflix et vous auriez bien tort de vous priver de regarder cet anime qui aura durablement marqué l’histoire des méchas et plus généralement de l’animation.
L’article est l’adaptation enrichie d’un thread Twitter publié pour des raisons d’archivage et d’indépendance des plateformes.
Un jour un « Ange » débarque dans un Tokyo post-apo pour tout casser. Shinji, tout juste adolescent, va devoir l’affronter, lui, ainsi que ses peurs et ses doutes, dans un robot géant. D’autres Anges suivront, mais qui sont-ils ?? Quelle organisation emploie Shinji ? Que veut son père ? Et pourquoi combattre les méchants ?
C’est basiquement l’histoire de Neon Genesis Evangelion et il y a bien des raisons de regarder ce superbe anime.
1. L’opening qui déboite
Commençons par le commencement. L’intro laisse percevoir toute la profondeur et l’intrigue de la série. Les personnages sont présentés avec l’image qu’ils veulent bien montrer d’eux (souriants), isolés les uns des autres. Il résume à merveille la série avec une musique parfaitement synchronisée qui rentre génialement dans la tête.
Plein de parodies en existent d’ailleurs, plus ou moins officielles avec des œuvres/courants politiques/moments historiques très différents et c’est assez chouette.
2. Les mechas
Evangelion, c’est aussi des robots qui se battent et, même si c’en a pas l’air, dit comme ça, c’est assez cool. Les combats sont rendus lisibles par des astuces de réalisation et l’issu est rarement déterminée par celui qui tapera le plus fort.
3. La psychologie des personnages
Mais Evangelion, c’est aussi et surtout des adolescents livrés à eux-mêmes et esseulés qui vont devoir faire face à des choix et à l’altérité. Comme tout anime certes, mais ici les scènes d’introspection caractérisent la majeure partie des épisodes.
La souffrance et la peur de l’abandon hantent tous les personnages et vont guider leurs actions.
J’ai écrit sur moi-même. Un ami m’a prêté un livre sur les maladies mentales et ça m’a fait un choc, comme si j’avais enfin trouvé ce que j’avais à dire
Hideaki Anno dans Newtype à propos des épisodes 16 et suivant
4. La psychanalyse
Evangelion c’est aussi l’œuvre d’un mec (Hideaki Anno) qui a fait une dépression et qui s’en est (plus-ou-moins) sorti grâce à de thérapie lacanienne. Il y a plein de lectures complexes qui s’entremêlent (troubles qui remontent à l’enfance, besoin de répétition, pulsions, complexes d’Œdipe) très intéressantes.
« Evangelion c’est ma vie et j’ai mis tout ce que je sais dedans. C’est ma vie entière. Ma vie elle-même » .
Hideaki Anno
5. Les résurrection de la religion
De la même façon, il est intéressant de revoir comment l’anime revisite et emploie toute une imagerie religieuse de façon plus-ou-moins détournée. Il y a une vraie réflexion derrière et ça complexifie le lore de cette ambiance pré-apo.
6. Un peu de sociologie et d’ethnologie
Après sa dépression, Anno s’inquiète de tous ces jeunes hikikomoris qui refusent de se confronter aux autres et au monde extérieur. L’anime est un signal d’alarme face au dilemme de l’hérisson.
7. Une philosophie à part entière
Et dans le récit initiatique qu’est Evangelion, il faut voir une réelle leçon de vie constitutive d’une philosophie à part entière. Comment faire avec les autres, que dire, que ne pas dire, comment ne pas les blesser et (donc ?) se blesser, que faire de sa souffrance, affronter, fuir ou esquiver ?
Ces questions fondamentales apparaissent tout au long de l’anime et doivent guider notre vie, c’est sans doute pour ça que regarder l’anime est nécessaire

8. Une réalisation efficace
Eva c’est une leçon pour faire beaucoup avec peu. Pour produire cette série, niveau argent c’était la galère et niveau timing, c’était pire. Anno a donc eu recours à de nombreuses astuces pour faire des planches simples
Des scènes sont réutilisées, les personnages vus de loin pour éviter les détails (et accentuer l’aspect de vacuité de monde), les plans fixes sont multipliés pour marquer des pauses, la « caméra » se déplace dans un seul grand dessin, plusieurs personnages se parlent sans se regarder sur le même plan pour éviter de devoir faire un champ/contre-champ.
9. Un scénario complet
Pour que le fond suive la forme, c’est tout un propos qui doit s’adapter, des scènes de combat qui doivent être économisées et un univers qui est terrrriblement complet et complexe (d’ailleurs trop, ne soyez pas frustré·e de pas tout comprendre du premier coup).
La symbolique est forte et aussi esthétique que passionnante. Ajouté à ça que pour l’époque, Evangelion est totalement novateur. L’anime déconstruit tout un genre (son influence va être immense). Pour la première fois, le pilote d’un robot géant, n’aura pas envie de le piloter !
10. Des interprétations multiples
C’est simple, la série a deux fins (les épisodes 25 et 26 et le film The End of Evangelion) et les analyses se contredisent pour savoir s’il s’agit de la même fin sous un autre angle ou d’une différente, de ce qui se passe vraiment et même du sens de certaines répliques.

En plus des différents niveaux d’analyses (psychanalytique, religieux, philosophique, …), c’est aussi les différents ressentis que cette ambiance post-apo suggèrent qu’il est intéressant d’analyser. Ne serait-ce que pour soi. Car finalement, l’œuvre parle surtout de nous-mêmes.
Il y a en fait autant de façon de voir la série et sa fin que de personnalités de spectateur. Certains voient Shinji comme un lâche, d’autre comme le plus humain des personnages.
Pour bien la comprendre, il faudra être à l’écoute, des personnages comme des autres fans et donc sortir de chez soi (au sens propre comme figuré). La boucle est bouclée. D’ailleurs Anno n’a jamais voulu commenté son œuvre
Evangelion est comme un puzzle. […] Nous proposons aux spectateurs de penser par eux-mêmes, afin que chacun puisse imaginer son propre monde. Nous n’offrirons jamais les réponses. Comme beaucoup de fans d’Evangelion, ils peuvent s’attendre à ce que nous leur fournissions les manuels « tout sur Eva », mais cela n’existe pas. Ne vous attendez pas à recevoir des réponses de quelqu’un. Ne vous attendez pas à ce qu’on vous serve tout le temps. Nous devons tous trouver nos propres réponses.
Hideaki Anno
Où trouver les analyses ?
11. Bonus – L’outro
Il n’est apparemment pas sur Netflix pour des raisons de copyright mais mon dieu que c’est dommage.
Plus d’excuse pour ne pas voir Eva et devenir un « evafag » à votre tour maintenant !